Termes de référence pour l’enquête sur les modèles positifs en matière de protection de l’enfance
Tdh, projet de lutte contre les violences sur les enfants, 2014-2016.
- Contexte et justification de l’enquête
Contexte
L’ampleur du phénomène de la violence à l’égard des enfants au niveau mondial en général et au Burkina Faso, en particulier, et la gravité de son impact sur le développement de l’enfant et la cohésion sociétale sont tels que la lutte contre les violences faites aux enfants devient une priorité pour les acteurs de développement.
Pour accompagner et soutenir l’Etat Burkinabé dans sa volonté de lutter contre toutes formes de violence faites aux enfants et renforcer les initiatives en cours, Terre des hommes Lausanne Délégation du Burkina Faso (Tdh) met en œuvre, avec quatre autres partenaires de la société civile, et dans quatre provinces du Burkina Faso (Houet, Ganzourgou, Kadiogo et Séno), un projet de « lutte contre la violence sur les enfants au Burkina Faso» sur une période de trois ans (janvier 2014-décembre 2016). Au total, ce sont 5000 enfants en situation de travail, en situation de rue, des élèves des foyers coraniques et des mineurs en conflit avec la loi qui sont ciblés pour améliorer leur capacité à se protéger des violences mais aussi à protéger leurs pairs. Parmi eux, 1000 enfants victimes sont aussi ciblés pour bénéficier d’une prise en charge adéquate à travers les mécanismes de protection que le projet va renforcer.
La stratégie globale de Tdh et de ses partenaires dans ce projet est de contribuer à la mise en place et au renforcement d’un système national de protection de l’enfance afin de mieux adresser les questions liées à la prévention et à la prise en charge des enfants victimes ou à risque de violence. Pour ce faire, l’objectif général du projet est de contribuer à la réduction de la violence faite aux enfants en renforçant les systèmes de protection au niveau national et local.
De manière spécifique, il s’agira pour le projet de renforcer les mécanismes de prévention, de détection des violences faites aux enfants et de prise en charge des enfants victimes à travers une chaîne d’acteurs et d'actions qui agissent en synergie au sein de réseaux locaux de protection, qui allient l’institutionnel et le communautaire.
La mise en œuvre du projet repose sur quatre axes d’intervention:
1. La protection collectiveà travers la création et le renforcement du niveau communautaire du système de protection des enfants en mobilisant les enfants, les familles, les communautés, les acteurs en charge de l’encadrement des enfants (enseignants, maîtres coraniques, les aînés de la rue, les employeurs, etc.) pour, d’une part, une prise de conscience et une meilleure connaissance des manifestations de la violence faite aux enfants, mais aussi et surtout la promotion de mécanismes de signalement et de protection existants.
2. La protection individuelle qui vise à offrir aux enfants victimes ou à risque une réponse adéquate de protection c'est-à-dire une prise en charge intégrée et holistique qui repose sur l’approche « gestion de dossiers/case management ».
3. Le renforcement des mécanismes de protection afin d’offrir aux enfants vulnérables ou victimes de violence une réponse de qualité à travers la promotion et le renforcement de mécanismes efficaces de détection, de signalement, de référencement et de prise en charge des enfants victimes ou exposés. Ce qui passera par le renforcement de différents mécanismes de protection , l’appui à la mise en place et au renforcement de familles d’accueil, l’amélioration de la qualité de l’accueil et de prise en charge d’urgence dans les centres privés et publics, l’appui au dispositif de signalement étatique des violences sur les enfants à travers le numéro vert (116), le renforcement des capacités opérationnelles, techniques et financières des services sociaux et des réseaux provinciaux de protection de l’enfance, etc.
4. Le plaidoyer en direction des autres partenaires de la protection de l’enfance et des premiers décideurs pour la prise en compte de l’approche système de protection de l’enfance dans les politiques et programmes de protection de l’enfance au Burkina Faso, aussi bien au niveau institutionnelle que communautaire.
Afin d’assurer une certaine durabilité aux actions du projet, des stratégies sont définies, notamment au niveau communautaire, pour favoriser le changement de comportement des parents et « gardiens » des enfants vulnérables à la violence. Cela passe notamment par la valorisation de bonnes pratiques de parents/tuteurs/gardiens dit « modèles positifs » qui seront identifiés dans la communauté pour protéger leurs enfants de la violence.
Cette approche dite de « déviance positive » représente l’objet de la présente enquête.
Justification
La déviance positive est une approche qui, jusqu’à présent, a surtout été expérimentée dans le domaine de la santé, et plus particulièrement dans le domaine de la lutte contre la malnutrition des enfants.
L’approche part d’un constat simple : certains parents dans une communauté donnée, et ayant accès aux mêmes ressources, risques et opportunités que la majorité des membres de cette communauté, ont des pratiques qui protègent leurs enfants de la malnutrition. Des acteurs du développement se sont donc penchés sur ces parents dits « modèles positifs » pour mieux comprendre les raisons et connaître leurs stratégies et/ou pratiques qui protègent leurs enfants.
La question que l’on se pose est la suivante : «Qu’est-ce qui permet à certains membres de la communauté (les modèles positifs - MP) d’avoir de meilleures solutions ou de mieux prévenir un problème répandu que leurs voisins ayant accès aux mêmes ressources ? ».
Cette approche peut se résumer ainsi :
Dans toute communauté, il y a des individus dont les habitudes et comportements peu communs leur permettent soit d’éviter un problème ou de trouver de meilleures solutions aux problèmes que leurs voisins ou collègues qui ont accès auxmêmes ressources.
Une fois identifiés, ces parents sont encouragés à partager leurs connaissances mais surtout leurs pratiques avec d’autres parents de la communauté, voire les accompagner dans la réalisation et la mise en œuvre si nécessaire. Il s’agit donc d’une approche strictement endogène, qui part des connaissance de parents ou voisins pour favoriser le changement de comportements, et non de connaissances venues de l’extérieur dispensées par des agents de santé ou des personnels d’ONG.
L’accent est mis sur les Pratiques des modèles positifs et non sur les modèles positifs eux-mêmes (les parents). En effet, nous ne pouvons pas « cloner » les gens mais, nous pouvons adopter leurs comportements et stratégies prouvés comme efficaces. De plus, il s’agit de limiter au maximum des comparaisons entre les individus ou de prendre le risque de stigmatiser certaines personnes de la communauté qui feraient mieux ou moins bien que d’autres. L’approche de la déviance positive ou modèle positif met l’accent sur la pratique plutôt que sur la connaissance : il est plus facile d’appliquer une nouvelle manière de penser que de penser à une nouvelle manière d’agir.
Bien que la majorité des problèmes ciblés aient des causes sous-jacentes compliquées et interconnectées, la présence des MP démontre qu’il est possible néanmoins de leur trouver aujourd’hui même des solutions efficaces, bien avant que les causes ne soient abordées.
Dans le cadre de la thématique du projet, la lutte contre les violences sur les enfants, l’approche de modèle positif semble particulièrement adaptée pour identifier des stratégies en faveur de changements de comportement au sein des communautés et des familles/tuteurs à risques face à la violence sur les enfants. Le but est de donner aux communautés la possibilité de découvrir et de “posséder” leurs propres solutions basées sur leurs propres ressources.
Dans le cadre du projet, cette activité sera mise en œuvre par des organisations à base communautaire (OBC) bénéficiaires de subventions en cascades, accompagnées par les ONG et associations responsables de la mise en œuvre du projet : Terre des Hommes, Keoogo, Tié et Handicap International. Le rôle des OBC sera, sur la base des résultats de l’enquête par zone, d’accompagner les communautés ciblées à élaborer et mettre en œuvre un projet basé sur les résultats de l’enquête ayant pour but l’acquisition de nouveaux comportements parmi le groupe cible.
Le groupe cible, dans le cadre du projet, va au-delà de la famille nucléaire. Il prend en compte non seulement le concept de famille élargie, de tuteurs mais aussi d’employeurs par exemple quand l’enfant vit avec son employeur. Les maîtres coraniques sont ainsi pris en compte, en tant que tuteur des enfants taillés.
2. Objectifs de l’enquête
L’objectif global est de découvrir, dans les quatre zones d’intervention du projet, des comportements inhabituels bénéfiques parmi des parents/tuteurs et qui soient faciles à adopter par d’autres membres des communautés.
De manière plus spécifique, il s’agit de : Établir les normes de comportement au sein des communautés ciblées en lien avec les problématiques de violences sur les enfants (exploitation, abus, négligence, maltraitance, etc.) ;
Découvrir des comportements et stratégies peu répandus mais efficaces, pratiqués par certains parents/tuteurs et qui constituent des Modèles Positifs pouvant être promus auprès des autres membres de la communauté ;
Découvrir des comportements et stratégies peu répandus mais efficaces, pratiqués par certains parents/tuteurs et qui constituent des Modèles Positifs pouvant être promus auprès des autres membres de la communauté ;
Élaborer un projet basé sur les résultats de l’enquête ayant pour but l’acquisition de nouveaux comportements parmi le groupe cible, sur le modèle des MP, suivant l’approche déviance positive.
3. Méthodologie de l’enquête
La méthodologie d’enquête sur les Modèles Positifs est l‘instrument utilisé pour la découverte par la communauté des comportements et stratégies inhabituels des individus « modèles positifs ». Ce type d’enquête repose généralement sur les étapes suivantes :
Définir :
- Le problème, ses causes et les comportements de la communauté en question ;
- Définir aussi à quoi ressemblerait une solution efficace et des comportements bénéfiques (en termes de comportements et résultats désirés).
Déterminer :
- La présence au sein de la communauté d’individus ou groupes qui ont déjà adopté les comportements bénéfiques ou ont obtenu les résultats désirés (identification des modèles positifs)
(Ex : Présence d’enfants Talibés qui ne mendient pas dans un foyer coranique ; des enfants scolarisés dans des communautés où l’école est distante des domiciles ; etc.).
Découvrir :
- Les moyens ou les comportements uniques ou peu communs utilisés par les MP qui leur permettent soit d’éviter le problème, soit de mieux le surmonter et le résoudre voire même le prévenir (Ex : des parents accompagnent ou font accompagner des fillettes à l’école lorsqu’elle est distante de la maison pour éviter les risques sur le chemin de l’école).
Les résultats de l’enquête seront triés sur le volet pour identifier et sélectionner les comportements accessibles et pouvant être adoptés par tous les individus concernés. Les autres comportements non sélectionnés sont «Vrais mais inutiles» ou «VMI». Le consultant orientera le commanditaire dans ce sens sur la base de l’analyse du contexte et de la thématique du projet.
4. Résultats / produits attendus
Quatre principales catégories de délivrables sont attendus par le commanditaire :
L’état des lieux des « normes » comportementales en matière de gestion des violences sur les enfants dans les communautés/structures ciblées par l’enquête, en lien avec les problématiques majeures de violences retenues avec les partenaires de mise en œuvre ;
L’identification, dans les communautés/structures ciblées, de normes comportementales différentes, qui favorisent davantage le respect des droits des enfants, c’est-à-dire des comportements de déviance positive face aux violences faites aux enfants ;
L’identification des facteurs clés qui déterminent ces comportements de déviance positive ;
Une méthodologie d’identification et de mobilisation de parents/tuteurs modèles positifs pour des organisations à base communautaires (OBC) qui seront en charge de reproduire la méthodologie proposée dans le cadre de leurs activités dans les communautés ciblées ;
La proposition de projets/activités à mettre en œuvre par les OBC en lien avec l’approche des modèles positifs dans les communautés ciblées.
5. Période et durée de l’enquête
L’enquête est prévue de démarrer en octobre 2014, au plus tard le 15 octobre 2014, pour une période de 45 jours.
6. Profil des consultants
Tel que prévu dans le projet de recherche soumis au bailleur (Union Européenne), cette enquête sera accompagnée dans sa mise en œuvre par le Groupe d’Apprentissage des Programmes du Burkina Faso (GAP Burkina Faso) qui interviendra aux étapes suivantes :
- La sélection du consultant principal (profil international).
- La validation des outils et de la méthodologie de la recherche ;
- La validation du rapport provisoire.
Le GAP est un groupe de travail axé sur la recherche et la capitalisation dans le domaine de la protection de l’enfance au Burkina Faso et qui réunit des représentants du milieu académique national, des représentants d’organisations de la société civile intervenant dans le domaine de la protection de l’enfance et des représentants de deux Ministères, le Ministère de tutelle en matière de protection de l’enfance (le MASSN), et celui de la recherche scientifique et de l’innovation. L’objectif du GAP est, entre autres, d’améliorer la qualité des recherches menées au Burkina Faso dans le domaine de la protection de l’enfance en garantissant une certaine rigueur scientifique aux travaux menés par des ONG internationales ou nationales.
Le Gap est membre d’un réseau international plus large, le CPCN (Child Protection in Crisis Network) de l’Université de Columbia (NY-USA), qui sera également impliqué à travers l’un de ses représentants dans la conduite de l’enquête.
Qualifications spécifiques et expérience requises :
Nous recherchons un consultant international, spécialiste dans la conduite d’enquête de déviance positive, qui coordonnera le consultant national.
Les qualifications recherchées pour le consultant international sont les suivantes :
- Titulaire d’un diplôme universitaire en sociologie, sciences sociales ou autres diplômes équivalents (niveau minimum Bac + 5) ;
- Au moins une expérience et/ou une expertise dans la conduite d’enquête de déviance positive. Une expérience dans la conduite d’enquête de déviance positive dans le domaine de protection de l’enfance serait un plus ;
- Expérience professionnelle d’au moins 8 ans dont 5 ans dans la recherche, méthodologie participative avec les communautés ;
- Au moins une publication dans une revue scientifique internationale ;
- Bonne connaissance de la protection de l’enfant ;
- Très bonne capacité d’analyse et de synthèse ;
- Motivation à travailler sous pression et en équipe ;
- Bonne maîtrise de la langue française (comprendre, lire et parler) ;
- Une bonne connaissance du contexte culturel du Burkina Faso ou à défaut des pays de la sous-région Afrique de l’Ouest et des problématiques de la violence envers les enfants ;
- Adhésion aux valeurs et à la mission de la Fondation Terre des Hommes Lausanne notamment sa politique de sauvegarde de l’enfant.
Les critères suivants déterminent l’égibilité du candidat : 1 ; 2 ; 8.
How to apply:
Les candidats intéressés doivent soumettre leur offre technique et financière, accompagnée d’un CV, un extrait de publication dans une revue scientifique, au moins un extrait d’enquêtes (résumé exécutif) en lien avec le domaine de la recherche et deux références à :
Fondation Terre des hommes Lausanne, 01 BP 2212 Ouagadougou 01, Rue 13.04 Avenue Maané-Kaka, par dossier physique et/ou par email, au plus tard le 1er Octobre 2014, aux adresses courriels suivantes :
Ccc: tdhbfsg@gmail.com